Albert
MARQUET

(1875 - 1947)

C’est au contact des leçons de Gustave Moreau que se profilent les orientations d’Albert Marquet. Ainsi qu'Henri Manguin, Henri Matisse et Charles Camoin, il fréquente l’atelier entre 1895 et la mort du maître en 1898, qui oblige les artistes à se disperser dans d’autres ateliers. Ils garderont toutefois une amitié durable, des préoccupations et lieux d’exposition communs, au moins jusque dans la première décennie du XXème siècle.

Plusieurs caractéristiques du travail de Marquet, parmi lesquelles son appréciation de la mise en page, peuvent être considérées en référence à l’estampe japonaise. Matisse soulignait d’ailleurs les similitudes de la vision de Marquet avec celle du maître Hokusai. Il faut dire que Paris est alors baigné d’un japonisme ambiant, entretenu par de nombreuses expositions auxquelles Samuel Bing est bien souvent associé. Gustave Moreau lui même nourrissait une véritable passion pour les estampes japonaises.

Marquet est fortement impressionné par cette esthétique, adoptant certains traits caractéristiques de cette représentation, notamment la transcription elliptique des formes ou l’utilisation de cadrages inhabituels, qui peuvent par exemple être entravés par le surgissement d’un premier plan envahissant. Mais l’apport de l’estampe dans l’œuvre de Marquet se définit surtout par l’appropriation d’une perception générale de l’espace différente de celle qui domine en Occident depuis plusieurs siècles.

En 1905, répondant à l’invitation de Manguin à Saint-Tropez, le peintre séjourne quelques temps à la Villa Demière. Charles Camoin le rejoint, marquant le point de départ d’un périple côtier studieux. Les deux artistes longent la mer, se rendent à Agay pour peindre auprès de Louis Valtat et Edmond Cross, visitent Marseille.

C’est pendant la première guerre, entre 1916 et 1918, que Marquet reviendra dans la cité phocéenne, louant un atelier sur le quai de Rive-Neuve qui domine le port. De ce point de vue, il peut s’adonner à l’observation d’une vie grouillante, qui s’organise autour du bassin. En fond de ses compositions, le pont transbordeur répond par sa perpendiculaire schématique aux verticales des mâts des bateaux. Marquet saisit (notamment par des attitudes, des mouvements) une instantanéité qui donne corps à la réalité picturale, au point de lui conférer, de manière un peu paradoxale, un caractère d’universalité et de permanence.

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